Dolkun Isa, de l’autre côté du mur

Dolkun Isa, de l’autre côté du mur

Libération, par Laurence Defranoux, Envoyée spéciale à Munich (Allemagne)

publié le 9 septembre 2021 
L’ancien leader étudiant ouïghour milite depuis 1985 pour les droits des peuples du Xinjiang. Etiqueté «terroriste» par la Chine, il vit en exil à Munich, d’où il a appris la détention et la mort de ses proches.
 
Pendant vingt et un ans, son visage carré aux pommettes hautes a été signalé à toutes les polices du monde. Interpol a effacé la notice rouge émise par la Chine pour «terrorisme» contre Dolkun Isa en 2018. Mais cette figure de proue de l’opposition politique ouïghoure reste la bête noire de Pékin. L’an dernier, il a convaincu sir Geoffrey Nice, ancien procureur général chargé des poursuites contre Slobodan Milosevic, d’enquêter sur les crimes commis au Xinjiang. En juin, alors que le «Tribunal indépendant ouïghour» s’ouvre à Londres, son petit frère, moniteur d’auto-école, est condamné en Chine à la prison à perpétuité. Le choc est violent. «J’étais prêt à payer le prix fort pour défendre les droits constitutionnels des peuples turciques au Xinjiang. J’ai accepté que mes enfants me demandent si j’ai tué des gens, d’être arrêté sans cesse, de vivre dans la peur d’être extradé ou que ma voiture soit sabotée. Mais je ne pensais pas qu’ils iraient si loin avec mes parents, avec mes frères et sœurs qui n’ont jamais fait de politique.»