Chine: quatrième condamnation d’un militant des droits de l’Homme

TV5MONDE, 10 Août 2016

Gou Hongguo, un militant chinois des droits de l’Homme qui a combattu les expropriations forcées, a été condamné vendredi à trois ans de prison « avec sursis », la 4e condamnation pour « subversion » rendue cette semaine contre des critiques du régime.

Militant et chrétien, Gou a été accusé de s’être rendu à l’étranger pour y être « entraîné à subvertir le pouvoir de l’Etat », a indiqué dans un microblog la Deuxième cour intermédiaire populaire de Tianjin (nord).

Il a été reconnu coupable d’avoir cherché à « retourner l’opinion publique » contre le gouvernement et d’avoir tenté de « renverser le système socialiste », précisait le tribunal.

Condamné à trois ans d’emprisonnement avec sursis, Gou Hongguo a, selon l’agence étatique Chine nouvelle, plaidé coupable et ne fera pas appel. La justice en Chine reste étroitement soumise aux autorités politiques.

Ce même tribunal avait prononcé ces derniers jours de plus lourdes peines contre des militants connus, à l’issue de procès expéditifs, marquant un nouveau durcissement de la répression des voix critiques du régime communiste sous la présidence de Xi Jinping.

Gou Hongguo s’était distingué en protestant vivement contre les évictions forcées, fréquentes en Chine, qui voient des promoteurs s’emparer de logements de résidents démunis après des expropriations souvent violentes cautionnées par le gouvernement.

M. Gou avait été arrêté il y a un an, à la suite d’une vague de 200 interpellations d’avocats et militants en juillet 2015 dans toute la Chine.

Outre Gou, trois autres étaient jugés cette semaine à Tianjin, lors d’audiences interdites aux membres de leurs familles comme aux médias occidentaux et vivement critiquées par les ONG.

L’avocat Zhou Shifeng, directeur du cabinet pékinois Fengrui –connu pour défendre dissidents, artistes contestataires comme Ai Weiwei ou groupes religieux interdits– a été condamné jeudi à sept ans de prison pour « subversion ».

Hu Shigen, auteur dissident et responsable d’églises clandestines, a écopé mercredi de sept ans et demi de prison, et la veille le militant Zhai Yanmin, organisateur de manifestations, s’en sortait mardi avec trois ans et demi avec sursis.

– Procès ‘politiquement motivés’ –

Les peines « avec sursis » infligées à Gou et Zhai ne signifient aucunement une libération immédiate: Zhai Yanmin n’est toujours pas rentré chez lui et ses proches ignorent où il se trouve.

« Même s’ils sont libérés, cela ne signifie pas qu’ils sont complètement libres. Ils peuvent être placés dans un centre de détention » à l’existence légale incertaine, à leur sortie de prison, explique à l’AFP Kit Chen, directrice du China Human Rights Lawyer Concern Group, dénonçant des « procès-spectacles » jugés d’avance.
L’assistante-juriste Zhao Wei arrêtée l’an dernier a été officiellement « libérée sous caution » le mois dernier mais sa famille n’a toujours pas reçu de ses nouvelles, relève Mme Chen.

L’épouse de Gou, Fan Lili, se voulait optimiste vendredi: « Je serai heureuse quand je le verrai rentrer à la maison, afin que notre fils (né il y a 16 mois) ait un père », a-t-elle déclaré à l’AFP, expliquant demeurer sous « étroit contrôle » policier.

Elle s’était rendue à Tianjin en début de semaine sans même pouvoir apprendre la date du procès, avant d’être contrainte de repartir par les forces de l’ordre.
Washington s’est indigné jeudi de ces salves de condamnations, le département d’Etat appelant Pékin à « libérer tous les avocats et militants arrêtés en juillet 2015 ».

« Il est troublant que les autorités chinoises aient interdit aux accusés un avocat de leur choix et les ait privés de contact avec leurs familles » pendant leur détention, a déclaré son porte-parole Mark Toner, qualifiant les accusations de « vagues et apparemment motivées politiquement ».

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